samedi 18 octobre 2008

Une crise qui s’est faite en grande Bretagne

« Crise financière : et comment ne seraient-ils pas euphoriques ? par Raúl Zibechi


Une crise qui s’est faite en grande Bretagne, par Robert Griffith [Secrétaire général du Parti Communiste de Grande-Bretagne,

Publié 18 octobre 2008 Economie , L'Europe

voir http://en.wikipedia.org/wiki/Robert_Griffiths_(politician) ndt]
traduit de l’anglais par Marc Harpon pour
http://socio13.wordpress.com/: changement de société

Les chiffres nets de la croissance nationale des deux prochains trimestres révèleront-ils que, en réalité, l’activité économique recule en Grande-Bretagne et que par conséquent l’économie est en fait en récession?

Le mouvement ouvrier et la gauche ne devraient pas se laisser happer dans cette mascarade superficielle. Pour des millions de gens, la récession est déjà bien réellement en marche.

Nous assistons au plus gros assaut contre le niveau de vie des classes laborieuses depuis le début de la gestion à la Thatcher il y a trente ans.

Le chômage augmente plus vite que jamais de la fin des années 70. un million de chômeurs manquent au chiffre officiel, mais le chiffre réel est presque le double de celui-ci. La tendance impitoyable à forcer les personnes en longue maladie et les personnes dépendantes à passer de ‘laide sociale aux bas salaires ou à l’indigence augmentera la misère, tout en camouflant l’étendue totale des prochaines hausses du chômage.

Le salaire n’augmente pas de plus de 2,5% et 3,5% par an respectivement dans le secteur public et le secteur privé. Le salaire minimum national, les pensions d’Etat et l’aide sociale sont percutés de plein fouet par l’indice des prix à la consommation.

Pendant ce temps, les prix alimentaires sont en moyenne de 14% plus élevés qu’à la même période l’an dernier, la plus forte hausse depuis 1980. Des produits alimentaires de base comme le pain, les pommes de terre, le poulet, les œufs, la margarine et le beurre se sont envolés d’un tiers ou de la moitié de leur prix. Le carburant a grimpé d’un quart.

Le prix du gaz domestique est monté d’un tiers depuis le début de cette année et l’électricité d’un quart. C’est 1à fois plus qu’aucune hausse des salaires, des pensions et de l’aide sociale.

Le véritable rythme annuel de l’inflation, pour beaucoup de gens est d’au moins 30%.

Pourtant, le gouvernement, les médias de masse et la Banque d’Angleterre nous racontent que, selon l’indice des prix à la consommation, le coût de la vie croît de seulement 4,4% par an. Même l’indice des prix au détail, qui inclut les coûts du logement, ne place pas la barre à moins de 5%.

Pourquoi une telle divergence entre le monde fabuleux du gouvernement, des affaires et des statisticiens des médias officiels d’un côté, et le monde réel de la classe laborieuse et d’une partie des classes moyennes de l’autre?

Les indices officiels considèrent les changements des prix sur un an d’un « panier » de postes de dépenses des ménages, chaque poste étant affecté d’un poids selon son importance dans le budget normal des ménages.

Selon les dernières estimations de l’indice des prix à la consommation, en Grande-Bretagne, seulement 10% des dépenses du ménage « normal » portent sur la nourriture, 3% sur le gaz et l’électricité et 4% sur le carburant. Ces domaines sont ceux ou ont eu lieu les plus fortes hausses mais leur impact dans le ménage de l’indice des prix à la consommation a, sans surprise, été négligeable.

Monsieur et madame Prix à la Consommation sont impatients d’acheter la dernière voiture à la mode et le dernier équipement audiovisuel, d’aller à l’opéra, de manger dehors fréquemment
et de payer les frais de scolarité de la jeune Jemima et de Jocelyn. Ils dépensent donc 5% en achats de véhicules, 14% sur la culture et les loisirs (exceptés les pubs et les clubs), 2% sur l’éducation et 11% au restaurant et au café (mais pas à la cantine).

Ces domaines sont beaucoup de ceux où les plus faibles hausses ont eu lieu durant les douze derniers mois par rapport à la période précédente. Donc, abracadabra, le coût de la vie en Grande-Bretagne est monté de 4,4%.

Soit les ministres du gouvernement connaissent cette supercherie, en ce cas ce sont des arnaqueurs, soit ils l’ignorent, en ce cas ce sont des crétins ignorants qui ne représenteront pas de si tôt l’intérêt des travailleurs et de leurs familles.

La réalité est que le New Labour représente principalement les intérêts des gros des affaires. Ce gouvernement a orchestré un été indien des faussaires, des escrocs et des spéculateurs.

Pendant que dans la City, le pétrole, le gaz, l’électricité, l’eau et la grande distribution flambaient, les firmes multinationales ont été autorisées, en fait activement encouragées, à faire de super rentes de situation monopoliste [allusion probable au refus de Gordon Brown d'intervenir sur le marché de l'énergie pour venir en aide aux familles modestes, ndt].

Le genre de créature qui prolifère sous le New labour n’est pas le travailleur hospitalier, l’ingénieur, l’aide soignant ni même le petit commerçant.

J’appelle à la barre Crispin Odey, associé du fond de spéculation Odey Asset Management.

Il a eu une année pleine de succès dans la vente de contrats agro-alimentaires, sans le moindre désir de fournir de la nourriture à qui que ce soit, et dans l’ »emprunt » d’actions du bâtiment pour les vendre et les racheter en faisant une plus-value sur un marché en chute libre, ce qui s’appelle le « shorting » dans l’argot de la City.

Pour avoir accompli un travail si socialement utile, il s’est offert 28 millions de livres sterling d’honoraires et de salaire.

Toutefois, la compétence des gradés des conseils d’administration des banques de Grande-Bretagne n’est pas à la hauteur de leur cupidité. Ils sont en train de changer les profits records de l’an dernier en pertes pour cette année, pendant que les pigeons rentrent à la volière sous le ciel assombri.

Même 1 milliard de livres sterling d’argent public- ni même 150 milliards s’ils obtiennent ce qu’ils veulent- ne les sauvera pas tous d’une « contraction du crédit » qu’ils ont eux-mêmes largement contribué à provoquer.

Maintenir la demande au sein de l’économie à travers les emprunts publics et privés n’aurait jamais pu permettre de créer le « nouveau paradigme économique » par lequel Gordon Brown aurait voulu abolir la loi fondamentale des crises cycliques du capitalisme.

Cette politique a repoussé une crise périodique de surproduction, où le capitalisme n’est plus capable de vendre tous ni même la majorité de ses biens et services en faisant du profit, mais elle l’a fait d’une façon qui rend la récession encore plus aigue lorsqu’elle vient, parce que le pouvoir d’achat basé sur le crédit s’effondre plus vite.

Dans le même temps, les banques se démènent pour maintenir des taux d’intérêts élevés pour soutenir leur revenu, des firmes qui ont emprunté pour s’agrandir cherchent à maintenir des prix élevés pour assurer le paiement de leurs intérêts et un gouvernement qui refuse d’imposer les riches et les affaires doit imposer le reste d’entre nous et mettre la pression sur le secteur public.

Donc la demande économique continue à tomber et le chômage à augmenter, tandis que les taux d’intérêts et les prix demeurent élevés -répétition de la « staglfation » [concomitance de l'inflation, de la stagnation de l'activité et du chômage, ndt] du début des années 1980.

Bien que les facteurs internationaux aient exacerbé cette crise de l’économie britannique, ils ne l’ont pas créée. La culpabilité du New labour est beaucoup plus grande, et ce d’autant plus qu’il a autorisé le déclin de l’industrie manufacturière tandis que la Grande-Bretagne devenait trop dépendante du secteur financier.

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